Volets ouverts, Moulin de la Rive - Locquirec
Un été, avec
mon ami A., nous avions loué une petite maison dans les terres, à Plufur, de l’autre
côté de Locquirec. Je l’avais amené là, au Moulin de la Rive.
La beauté de
cette plage, cette maison perchée seule sur la mer, au bout du monde, avait décidé mon père à venir passer ses vieux jours dans les parages.
Depuis,
tous les ans, plusieurs fois dans l’année, je viens ici, rêver. C'est si beau. A cause de la rivière
qui s’y jette, la mer est dangereuse. C'est un spot de surfeurs.
Mon ami m’a dit : je connais cet endroit.
Je ne suis jamais venu mais je l’ai déjà vu, en photo. J’en ai entendu parler
toute mon enfance. Chez ma nounou. Elle m’a gardé de mes 2 mois à mes 8 ans. Claudine.
Elle a beaucoup compté dans ma vie. Je crois que cette maison, c’est la sienne.
Je ne suis pas sûr. Ça fait au moins 20 ans que je ne l’ai pas vue. Attends, je vais demander à ma sœur si elle n’a
pas gardé son numéro.
Dans l’herbe, derrière
la maison, une toute petite fille dressée dans une grande bassine, toute nue, s’est
jetée dans la grande serviette que lui tendait sa grand-mère. C’était l’heure
du bain, du soleil couchant, des retrouvailles d’A. et de Claudine, là, au bout
du monde, le lendemain. Elle nous a raconté que souvent, on venait lui proposer
de vendre sa maison ; une fois même, Eric Tabarly.
Pendant l’occupation, de
Lille, son père avait atterrit à Locquirec. Il avait fait de la résistance avec
les bretons du coin. Pour le remercier, à la fin de la guerre, on lui avait
donné ce bout de terrain. Il y a construit de ses mains, cette maison : une pièce
commune, un garage, un robinet.
Ils venaient de Lille, quand elle était
gamine, aussi souvent que possible, même l’hiver, malgré les heures de route. A
son tour, de Lille, elle y a emmené ses fils, et maintenant ses petits enfants.
Alors, cette maison, pas question de la vendre.
On a dîné à l’intérieur, serrés
autour de la grande table accolée à la fenêtre, au-dessus du bruit de l’océan.
A
chaque fois que je suis là, je prends une photo et je l’envoie à A.